Informing humanitarians worldwide 24/7 — a service provided by UN OCHA

Burundi

Rapport final détaillé de la Commission d’enquête sur le Burundi (A/HRC/36/CRP.1) (Advance Version)

Attachments

Conseil des droits de l’homme
Trente-sixième session
11-29 septembre 2017
Point 4 de l’ordre du jour
Situations des droits de l’homme qui requièrent l’attention du Conseil

I. Introduction

1. Le présent rapport est soumis par la Commission d’enquête sur le Burundi (ci-après « la Commission ») en application de la résolution A/HRC/RES/33/24 du Conseil des droits de l’homme, adoptée le 30 septembre 2016.

A. Mandat

1. Résolution 33/24 du Conseil des droits de l’homme

2. Le paragraphe 23 de la résolution 33/24 du Conseil des droits de l’homme précise que le Conseil des droits de l’homme « décide d’établir, pour une période d’un an, une commission d’enquête chargée d’accomplir les tâches suivantes :

a) Mener une enquête approfondie sur les violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits commises au Burundi depuis avril 2015, notamment pour en évaluer l’ampleur et déterminer s’il s’agit de crimes de droit international, afin de contribuer à la lutte contre l’impunité ;

b) Identifier les auteurs présumés de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits commises au Burundi, en vue de faire pleinement respecter le principe de responsabilité ;

c) Formuler des recommandations sur les mesures à prendre pour garantir que les auteurs de ces actes aient à en répondre, quelle que soit leur affiliation ;

d) Dialoguer avec les autorités burundaises et toutes les autres parties prenantes, en particulier les organismes des Nations Unies, la société civile, les réfugiés, la présence du Haut-Commissariat au Burundi, les autorités de l’Union africaine et la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, afin de fournir l’appui et les conseils nécessaires à l’amélioration immédiate de la situation des droits de l’homme et à la lutte contre l’impunité [...] ».

3. Le 22 novembre 2016, le Président du Conseil des droits de l’homme a annoncé avoir nommé comme membres de la Commission d’enquête sur le Burundi : Fatsah Ouguergouz (Algérie), Président de la Commission, Reine Alapini Gansou (Bénin) et Françoise Hampson (Royaume-Uni)1.

4. Le paragraphe 25 de la résolution 33/24 du Conseil des droits de l’homme précise que « toutes les ressources nécessaires à l’exécution [du] mandat [de la Commission seront] fournies par le Haut-Commissariat [des Nations Unies aux droits de l’homme] ». À cet effet, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) a mis à la disposition de la Commission un secrétariat avec les compétences spécialisées ainsi que l’assistance administrative, technique et logistique nécessaire à l’accomplissement de son mandat.

2. Interprétation du mandat

5. Les membres de la Commission d’enquête se sont réunis une première fois du 23 au 27 janvier 2017 à Genève. Ils ont à cette occasion interprété le champ d’application du mandat qui leur a été confié par le Conseil des droits de l’homme.

(a) Compétence matérielle (ratione materiae)

6. Le paragraphe 23 (a) de la résolution 33/24 précise que la Commission mènera « une enquête approfondie sur les violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits commises au Burundi [...] notamment pour en évaluer l’ampleur et déterminer s’il s’agit de crimes de droit international ».

7. Par « violations des droits de l’homme », la résolution vise, selon la définition courante, toutes les violations, par des agents ou entités étatiques, des droits garantis par la législation nationale et le droit international. Par « atteintes » aux droits de l’homme, la résolution renvoie, conformément à la pratique actuelle, aux exactions commises par des entités non-étatiques organisées avec une structure connue, ou leurs membres.

8. Étant donné l’ampleur de son mandat et du délai relativement bref qui lui a été imparti pour le mettre en oeuvre, la Commission a décidé de se concentrer en priorité sur les violations des droits de l’homme et les atteintes à ceux-ci les plus graves, en particulier celles qui sont susceptibles de constituer des crimes de droit international. Le Conseil des droits de l’homme lui a demandé en effet d’évaluer l’ampleur des violations et atteintes commises au Burundi et de « déterminer s’il s’agit de crimes de droit international »2. La Commission a interprété l’expression « crimes de droit international » comme les « crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale », tels que définis dans le Statut de Rome3. Dans le présent rapport, la Commission s’est attachée à mettre l’accent sur certains cas et événements emblématiques.

(b) Compétence personnelle (ratione personae)

9. Le paragraphe 23 (b) de la résolution 33/24 charge la Commission d’« identifier les auteurs présumés de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits commises au Burundi, en vue de faire pleinement respecter le principe de responsabilité ».

10. La Commission a pris soin de distinguer entre la responsabilité en matière de droits de l’homme qui ne concerne que l’État du Burundi pour les actes commis par ses agents ou des individus ou groupes agissant sous son autorité ou son contrôle4 et les responsabilités individuelles en matière de droit pénal international5. À cet égard, la Commission a, dans la mesure du possible, cherché à identifier les auteurs présumés des crimes de droit international et les chaînes de commandement afin d’établir notamment la responsabilité des chefs militaires ou des supérieurs hiérarchiques prévue par le Statut de Rome6.

11. Le Conseil des droits de l’homme s’est en particulier déclaré « profondément préoccupé par les informations selon lesquelles la plupart des violations et des atteintes sont commises par les forces de sécurité burundaises et les Imbonerakure (membres de la ligue des jeunes du parti au pouvoir), dans un climat d’impunité »7. Néanmoins, dans un souci d’impartialité, la Commission a tenu à examiner les allégations de violations des droits de l’homme et les atteintes à ceux-ci commises par toutes les parties – non seulement les forces de sécurité étatiques et les autorités gouvernementales, mais également les groupes armés, ou leurs membres, au Burundi8.

(c) Compétence territoriale (ratione loci)

12. Le paragraphe 23, alinéas (a) et (b), de la résolution 33/24 circonscrit le champ d’application géographique de la Commission d’enquête aux violations des droits de l’homme et atteintes à ceux-ci « au Burundi », c’est-à-dire commises sur le territoire du Burundi, ce qui inclut un examen des atteintes commises sur le sol burundais par des entités non-étatiques, ou leurs membres, basés à l’étranger.

(d) Compétence temporelle (ratione temporis)

13. Le paragraphe 23 (a) de la résolution 33/24 précise que la Commission mènera « une enquête approfondie sur les violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits commises au Burundi depuis avril 2015 [...] ». La résolution fixe donc clairement le début du mandat de la Commission qui coïncide avec les premières manifestations contre la candidature de Pierre Nkurunziza à l’élection présidentielle. En raison des exigences éditoriales, la Commission a dû finaliser son rapport au Conseil des droits de l’homme fin juillet 20179. Néanmoins, elle a continué ses enquêtes après cette date. Les résultats de l’ensemble de ces enquêtes sont reflétés dans le présent document.

14. Les membres de la Commission sont conscients qu’un travail d’observation et d’enquête sur les violations des droits de l’homme et atteintes à ceux-ci commises depuis avril 2015 au Burundi a déjà été mené par le Bureau du Haut-Commissariat aux droits de l’homme dans le pays et par l’Enquête indépendante des Nations Unies sur le Burundi (EINUB) établie par la résolution A/HRC/S-24/1 du Conseil des droits de l’homme. La Commission a donc pris en compte les conclusions du Haut-Commissaire aux droits de l’homme présentées dans son rapport à la trente-deuxième session du Conseil des droits de l’homme en juin 201610 et par l’EINUB dans son rapport présenté à la trente-troisième session du Conseil des droits de l’homme en septembre 201611. La Commission est néanmoins un organe indépendant. Elle a donc mené ses propres enquêtes et a systématiquement vérifié et corroboré les informations recueillies par les organes et mécanismes qui ont mené avant elle des investigations sur la situation au Burundi. La Commission a en outre un mandat qui couvre une période plus longue puisqu’il s’étend jusqu’à septembre 2017.